Petit trip rétro au Japon …

16 minutes de lecture

Le phénomène du retrogaming n’est pas nouveau, au Japon comme en occident il a débuté dans les années 2000 avec l’avènement de la 3D, la fin de la Dreamcast et le succès de la PS2 puis de la X-Box. A cette période les jeux et consoles 16-Bit étaient disponibles en quantité et à des prix bradés … je regrette de ne pas avoir acheté des jeux Neo Geo pour quelques dizaines d’Euros à l’époque ou encore Sapphire sur PC Engine … quand on voit les tarifs pratiqués aujourd’hui … mais bon c’est toujours plus facile à dire après :-). Comme tous les gamers qui ont beaucoup joué à cette période et gardé jeux et consoles j’ai constitué une petite collection et donc pas vraiment besoin d’acheter beaucoup de jeux rétro maintenant d’autant qu’ils sont devenus hors de prix.

Ceci dit ça fait quinze ans que je vais au Japon presque chaque année et je trouve encore de quoi compléter ma collection que ce soit consoles ou jeux. Sur cette période les choses ont bien changé, Akihabara à Tokyo et aussi Den Den City à Osaka ont perdu la plupart de leurs magasins de jeux, seules quelques boutiques d’occasion on résisté et se sont transformées en magasins de retrogaming. Depuis les années 2000 ces boutiques ont subi les assauts des gamers du monde entier et les prix ont explosé à mesure que les articles devenaient rares. Si on veut faire de bonnes affaires mieux vaut arpenter les magasins des petites villes de province mais attention le Japonais est presque obligatoire pour s’y repérer…

Malgré tout si on va au Japon en 2018 il y a encore de quoi se faire plaisir, les magasins de jeu résistent, les prix sont relativement stables depuis 2 ans d’autant que l’Euro est fort, et il y a toujours des salles d’arcade incroyables et des magasins de figurines qu’on ne voit nulle part ailleurs.

Mon dernier séjour en Avril a été assez varié, un peu de culture historique, beaucoup de culture geek avec quelques découvertes inattendues. Si vous allez à Tokyo je vous recommande ces boutiques, même juste par curiosité !

The untold history of japanese game developers

Avant de partir j’avais commencé la lecture de  »the untold history of japanese game developers », un ouvrage en 3 volumes écrit par le britannique John Szcepaniak, journaliste et passionné de retrogaming. Ce livre est une mine d’informations sur l’histoire du jeu vidéo japonais et regorge d’anecdotes et de faits inédits, il s’agit de discussions avec des développeurs qui ont travaillé pour la plupart des éditeurs que nous connaissons tous : Namco, Square Enix, Taito, Sega, Capcom, Konami, Hudson, SNK, Irem …

C’est une plongée sur plus de 30 ans d’histoire du jeu vidéo, du PC japonais d’avant windows jusqu’aux dernières générations de consoles. Ce livre permet de comprendre l’envers du décor, l’implication des Yakuza dans l’industrie par exemple ou encore le palmarès des développeurs et des artistes … saviez-vous que la mère de Joe Hisaishi (compositeur pour le studio Ghibli) était prof de piano et a donné des cours à Yuzo Koshiro lui-même compositeur pour Sega et à qui l’on doit notamment les musiques de Shen-Mue.

Amateur d’histoire du jeu vidéo je me suis régalé avec ces bouquins. Pour l’anecdote, il y a aussi 3 DVD qui les accompagnent mais ne sont plus disponibles, j’ai donc envoyé un mail à l’auteur qui m’a répondu le lendemain en me disant qu’un boutique de Tokyo en aurait peut-être un exemplaire.

C’est comme ça que j’ai pu découvrir BEEP dans une ruelle de Akihabara, une boutique spécialisée dans le rétro et plus particulièrement les PC Japonais des années 80-90(PC98-98, X68000 …), les cartes d’arcade et les jeux et consoles rares (PC Engine LT en boîte par exemple). Le propriétaire avait les DVD en stock 🙂 et j’ai appris que c’est un pote de Joseph Redon, un français installé au Japon depuis plus de 10 ans et qui réalise une collection et un projet de sauvegarde des jeux PC japonais (souvent sortis sur disquettes) à travers une association basée à Tokyo. De ce projet il en est question dans les livres et le DVD dont on peut trouver les meilleurs extraits sur Youtube.

The Untold History Of Japanese Game Developer : Volume 1

BEEP – Retro Game Space Museum

Voilà une boutique bien sympathique qui a pour voisine une autre échoppe spécialisée dans les consoles toutes générations et les jeux rares, deux bonnes surprises d’un coup qui rappellent comment était le quartier il y a plus de 10 ans … comme quoi c’est payant de sortir des grandes avenues !

Ces deux magasins valent largement le célèbre Super Potato ou encore le Retrogame Camp et Trader situés à quelques centaines de mètres de là. Les prix sont assez élevés mais pour un collectionneur ou quelqu’un qui cherche un titre spécifique en bon état c’est un bonne adresse. Autre lieu insolite la petite salle d’arcade Retro Game Space Museum tenue par un passionné et ouverte seulement en fin de journée située non loin de là.

L’endroit compte une vingtaine de bornes des années 80 et 90 dont un Ridge Racer et un Deco Cassette (borne très rare dont plus aucune n’est fonctionnelle), certaines ont été customisées notamment au niveau du son pour plus d’effets, surtout les basses. La salle est petite mais chaleureuse, on peut aussi y acheter des snacks, des boissons mais aussi des CD de musiques de jeu et des bouquins dédiés au jeu vidéo comme la version japonaise de la biographie de Nishikado (le créateur de Space Invadeurs) par Florent Gorges dont je vous avait parlé l’année dernière.

 

SEGA FES

Toujours dans le quartier d’Akihabara s’est tenu le SEGA FES pile la semaine de mon voyage, une bonne occasion d’assister en direct à ce grand événement pour tout Sega fan qui se respecte ! Sur deux jours Sega a investi le centre d’exposition du quartier pour faire quelques annonces, une expo pour les 20 ans de la Megadrive et les 30 ans de la Dreamcast, des activités diverses (un crane game géant!) et bien sûr des stands présentant les nouveautés ou encore des goodies comme ceux que l’on trouve au Tokyo Game Show. L’événement était destiné autant aux fans, à la presse ou encore aux curieux de passage et gratuit en plus …

L’occasion de voir le PDG de Sega sur scène montrer un prototype de la future Megadrive mini (pour l’instant réservée au Japon), annoncer un nouveau Sakura Taisen sur PS4 ou encore les tant attendus remix HD de Shen Mue 1&2 sur PS4 en attendant le 3ème volet toujours en développement ! En résumé une journée bien sympathique qui rassure sur l’avenir de SEGA après une décennie plutôt difficile …

Pas de nouvelle console en vue bien sûr mais la Megadrive mini officielle devrait avoir un beau succès si elle s’inspire de celles de Nintendo dont la qualité est irréprochable … espérons que ce sera bien loin des clones de merde que l’on trouve un peu partout comme la Megadrive flashback ! Ceci dit vu le niveau d’exigence des japonais je serais surpris si Sega proposait un sous-produit !

Kawasaki Game Center

Ce n’est pas la première fois que je visite cette salle immense mais cet article est aussi l’occasion d’en parler. Située à 45 minutes de la gare centrale, au sud de Tokyo c’est un immeuble de 7 étages dédié au jeu et un endroit particulièrement original puisque le premier étage est un décor reproduisant le quartier de Kowloon à Hong Kong tel qu’il était avant sa rénnovation dans les années 90. On y retrouve les appartements minuscules, les ruelles délabrées, les enseignes lumineuses chinoises, les petites boutiques ou encore le linge suspendu aux blacons …

L’ambiance sonore n’est pas en reste et au final le résultat est saisissant. Les concepteurs se sont inspirés de Shen Mue dont le deuxième volet se déroule à Hong Kong, c’est parfait pour une salle d’arcade. Outre les bornes classiques mais très rares comme Outrun ou Space Harrier en versions deluxe le premier étage contient près de 200 machines différentes dont pas mal de bornes dédiées. Comme dans la plupart des salles japonaises les jeux sont classés par thèmes, shoot-them-up, combat, puzzle …

Il y en a pour tout les goûts, sans oublier ceux qui sont plus spécifiques, simulations de foot ou d’équitation, tactical RPG, jeux de rythme … Les jeux vidéos et les crane games occupent trois étages, les suivants étant dédiés à d’autres activités comme le billard ou encore les fléchettes. Ce complexe vaut le détour lors d’un passage à Tokyo et pour moi c’était la suite logique à l’annonce du remaster de Shenmue 🙂

Yokosuka, sur les traces de Ryo Hazuki … encore Shen Mue

Justement en parlant de ShenMue l’équipe des créateurs menée par Yu Suzuki s’est inspirée de lieux réels. Je vous parlais de HongKong mais beaucoup plus près toujours au sud de Tokyo se trouve Yokosuka (environ 1H de train). Cette petite ville a été utilisée par l’équipe de Sega pour servir de décor au début du jeu.

Yokosuka est connue pour sa base navale où les navires militaires sont entretenus, on y retrouve une petite influence américaine avec quelques restaurants proposant des burgers aux proportions bien excessives pour la Japon ! L’année dernière l’office de tourisme local a réalisé une brochure avec un parcours que l’on peut faire principalement à pied montrant les différents points qui correspondent à des lieux visités par Ryo Hazuki dans le jeu, on y retrouve ainsi les magasins, restaurants, le parc, un temple …

C’est une initiative très sympa qui permet de rajouter une touche geek à cette agréable petite ville qui du reste est assez ordinaire. En tout cas il y a de quoi ravir les fans du jeu qui pourront aussi garder un joli guide papier en souvenir !

Grandes et petites figurines

Finalement la semaine a été bien remplie avec un passage à Yokohama ou encore sur l’ile d’Odaiba où le Gudam RX-78-2 a été remplacé par un modèle Unicorn MG RX-0 encore plus impressionnant car il est illuminé et change de position …

Je me demande ce qu’ils ont fait de l’autre modèle, qui sait il se trouve peut-être chez un collectionneur de figurines qui a beaucoup de place (les deux Gundam mesurent près de 20 mètres de haut) … et en parlant de figurines j’ai pu ramener le Link de Breath of the Wild version Medicom. La figurine coûte une fortune (250 EUR) mais c’est une merveille de détails et comme fan absolu de ce jeu il m’était difficile de ne pas craquer. Tokyo est bien le paradis des collectionneurs de figurines.

Certes on peut les retrouver sur internet à des prix similaires mais rien ne vaut le plaisir de chiner et d’explorer ces magasins. Du coup on y trouve des figurines nouvelles auxquelles on n’aurait pas forcément pensé en parcourant les sites web dédiés et le fait de les voir en vrai est incomparable ! L’autre avantage de Tokyo c’est le marché de l’occasion, ici certaines boutiques revendent des figurines (comme le célèbre Madarake) mais surtout elles louent des vitrines aux particuliers qui mettent en vente leurs propres figurines.

Ce système permet de trouver bon nombre de collectors ou tout simplement de modèles qui ne sont plus en vente depuis longtemps. Ainsi la variété des pièces disponibles est assez incroyable. Attention il ne faut pas s’attendre à de bonnes affaires, les prix sont ceux du marché et les vendeurs comme les boutiques savent très bien ce qu’ils vendent mais c’est un passage obligé pour les collectionneurs et les passionnés, impossible de trouver une telle variété ailleurs !

C’est ainsi que se termine ce court périple bien varié et qui m’aura permis pour la première fois de voir les cerisiers en fleur au Japon … il y avait comme une malédiction et je n’ai jamais réussi à y être présent au bon moment, soit trop tôt soit trop tard ! Les endroits visités sont faciles à retrouver et je vous mettrai les liens avec les références des bouquins cités ! Je travaille en ce moment sur deux projets d’arcade et je vous en parlerai prochainement.

Tetsuo

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